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Joseph Ponthus/Kebbah Sanneh & Pour X raisons. Rock & Painting #5

 "Rock & Painting, c’est une série née sur Facebook en octobre 2019 dans laquelle j’associe chaque jour une toile et un morceau de rock. Dans laquelle j’associe mon amour de la peinture et du rock". Catherine Pouplain. Juin 2020

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Que voit-on ? Trois corps. Trois corps de face, sans tête. Trois corps découpés en morceaux, chaque morceau numéroté comme un bœuf chez le boucher. Et pour cause.  Ce visuel, ce dessin a été créé justement en écho au livre de Joseph Ponthus qui parle, entre autres, de ces hommes qui épuisent leur corps à découper des animaux morts. Quand j’ai préparé cette chronique, j’ai cherché une œuvre pour évoquer le récit de Joseph mais en fait, cette œuvre était sous mon nez.

Ce corps découpé, indissociable du livre désormais et qui depuis un an, illustre la couverture ou le bandeau sur les étals des libraires. Comme quelqu’un que l’on croise pendant des mois sans le regarder et qu’un jour, on voit, comme une évidence. D’où venait ce visuel ? J’ai cherché. Et je suis très contente d’avoir découvert l’auteur méconnu de ce dessin. Il s’appelle Kebba Sanneh. C’est un dessinateur illustrateur graphiste, formé à l’école des Gobelins. Rare et certainement discret, peu de choses en ligne à l’exception de son site et d’une page Instagram qui recèle des merveilles. Ce dessin pour A la ligne, a été commandé par le directeur artistique des éditions de la Table Ronde, pour illustrer la couverture. La démarche, c’est Kebba qui me l’explique dans un mail :
« Joseph parle de son vécu mais à travers ses textes c’est la souffrance de milliers de personnes qu’il décrit.
Il n’est qu'un « outil » industriel complètement déshumanisé. C’est pour ça que ce personnage n’a pas de tête, on ne peut pas l’identifier. Ce sont des bras et des jambes, du muscle en somme dont l’employeur a besoin et non du reste. Si on regarde de près les membres, ils sont numérotés, chacun possède une valeur en fonction de son utilité. Cet homme, ce travailleur, cet intérimaire ce n’est personne, rien, sur cette ligne de production, il est à l’image du produit qu’il travaille. »

Et à propos de son travail sur cette couv, il finit par :
« J’y ai pris grand plaisir car le format était top et surtout, le témoignage indispensable. »

Ce dessin a été réalisé selon la technique du dotwork, le travail du point (dot en anglais). Cette technique ancestrale qui est largement utilisée dans les arts traditionnels du tatouage consiste à dessiner point par point sans presque aucune ligne, un comble pour un livre qui s’appelle A la ligne. Le résultat est fin et subtil. Poétique. En contraste avec la rudesse du sujet dans ce cas présent.

Côté musique, quel titre donc pour illustrer l’illustration ? Facile. Dans son livre, Joseph cite trois morceaux qu’il écoute dans sa voiture en rentrant du boulot, je cite :
« très fort à fond »

De ces trois titres rock j’ai choisi « Correspondances » du groupe de région parisienne Pour X Raisons. Un titre sur ce qui remue nos vies, sur ce qui va et vient et qui peut faire mal, sur les correspondances qu’on rate parfois. Ce groupe punk rock écrit court sans guère de ponctuation comme dans A la ligne, dénué de points et de virgules. Sans respirer, comme une urgence.
Tout s’aligne.

Site de Kebba Sanneh


Instagram de Kebba Sanneh

Pour X Raisons / « Correspondance »

Chronique diffusée dans le Rock Club de Radio Balises le 9 mars 2020. https://radiobalises.com/


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