Moral Soul. Du-All. Danse
INTERVIEW AVEC HERWANN ASSEH 23 avril 2018
Nous, on avait vu Du-All au festival de Kerhervy, et on avait été emballées par la relation qui se lisait entre Suzie et toi, cette chose très forte...
Ça a énormément changé depuis la création, en 2014, on a beaucoup tourné, déjà, en rue, à Aurillac, toujours en extérieur. On l’a créé dehors. On n’avait pas de studio, mais Suzie a tenu bon. Puis le Fourneau (Centre National des Arts de la Rue, à Brest, ndlr) nous a proposé une résidence et là on a commencé à travailler davantage la théâtralité. Au début c’était très carré, mécanique. On n’osait pas être naturels. Au Fourneau, ils nous ont poussés : « Que voulez-vous raconter ? Soyez plus simples ». Aujourd’hui on le vit vraiment. On ne fait pas du par-cœur. On utilise les accidents pour improviser, on prend des risques. On a lâché prise.
Comment ça se construit, un duo comme celui-là ?
Quand j’ai quitté le Quartz, en 2012, je n’avais rien, pas de salle, pas de lieu. J’étais resté douze ans artiste associé, un record. Au même moment, je rencontre Suzie dans un stage de danse parkour, et peu de temps après, à Morlaix, j’ai besoin d’un remplaçant. Elle assure : en deux jours elle reprend tout… Moi, en parallèle, j’avais envie de créer un duo, et ça a été évident que ce
serait avec elle. On vivait un vrai coup de foudre artistique. Suzie, elle était prête à me suivre jusqu’au bout. On a commencé à travailler en extérieur sur les marchés, les plages, c’est né comme ça. Du-All, c’est une rencontre. Le spectacle raconte aussi notre rencontre. Plus on avançait, plus on était sur la même longueur d’ondes.
C’était aussi un mélange d’esthétiques : tu viens du hip-hop, Suzie du contemporain…
Ah non pas du tout ! Suzie vient du jazz. Elle sortait de La Manufacture, à Aurillac. C’était une danseuse très explosive, mais jazz. Et moi j’ai beaucoup travaillé pour qu’elle coupe avec ça, avec le côté mécanique du jazz, qu’elle trouve les intentions. Elle était super tendue, elle voulait trop bien faire. Depuis, elle a lâché quelque chose, elle a laissé apparaître la fragilité. Aujourd’hui elle est devenue la danseuse principale de la compagnie, et on est devenus un couple de danseurs, comme ça n’arrive qu’une fois dans une vie. Une vraie osmose entre des danseurs, c’est une fois dans une vie.
On est proche du langage amoureux, là
Oui, c’est aussi fort que ça. Nos conjoints savent que quand on se retrouve tous ensemble, c’est Suzie et moi d’un côté, à parler tout le temps de ce qu’on pourrait faire. On a une passion de se voir, on est très attirés l’un par l’autre, tout le temps, on ne peut pas s’en empêcher. C’est très fort : c’est de l’émulation, de la créativité. On se surprend.
On a vu ce qu’Herwann a changé chez Suzie, mais qu’est-ce que Suzie a changé chez Herwann ?
Mon écriture. Je suis moins dans l’acrobatie, l’écriture est plus fine. Je ne fais plus de différence entre elle et moi. Suzie n’est plus dans l’apprentissage, elle sait comment être, elle propose des changements, des évolutions. On va tous les deux à la limite d’un épuisement identique. C’est du plaisir comme une drogue. Elle suit toujours et elle m’épuise. On a trouvé un équilibre homme/femme, une égalité.
Propos recueillis par Isabelle Nivet
Mai 2018
Nous, on avait vu Du-All au festival de Kerhervy, et on avait été emballées par la relation qui se lisait entre Suzie et toi, cette chose très forte...
Ça a énormément changé depuis la création, en 2014, on a beaucoup tourné, déjà, en rue, à Aurillac, toujours en extérieur. On l’a créé dehors. On n’avait pas de studio, mais Suzie a tenu bon. Puis le Fourneau (Centre National des Arts de la Rue, à Brest, ndlr) nous a proposé une résidence et là on a commencé à travailler davantage la théâtralité. Au début c’était très carré, mécanique. On n’osait pas être naturels. Au Fourneau, ils nous ont poussés : « Que voulez-vous raconter ? Soyez plus simples ». Aujourd’hui on le vit vraiment. On ne fait pas du par-cœur. On utilise les accidents pour improviser, on prend des risques. On a lâché prise.
Comment ça se construit, un duo comme celui-là ?
Quand j’ai quitté le Quartz, en 2012, je n’avais rien, pas de salle, pas de lieu. J’étais resté douze ans artiste associé, un record. Au même moment, je rencontre Suzie dans un stage de danse parkour, et peu de temps après, à Morlaix, j’ai besoin d’un remplaçant. Elle assure : en deux jours elle reprend tout… Moi, en parallèle, j’avais envie de créer un duo, et ça a été évident que ce
serait avec elle. On vivait un vrai coup de foudre artistique. Suzie, elle était prête à me suivre jusqu’au bout. On a commencé à travailler en extérieur sur les marchés, les plages, c’est né comme ça. Du-All, c’est une rencontre. Le spectacle raconte aussi notre rencontre. Plus on avançait, plus on était sur la même longueur d’ondes.
C’était aussi un mélange d’esthétiques : tu viens du hip-hop, Suzie du contemporain…
Ah non pas du tout ! Suzie vient du jazz. Elle sortait de La Manufacture, à Aurillac. C’était une danseuse très explosive, mais jazz. Et moi j’ai beaucoup travaillé pour qu’elle coupe avec ça, avec le côté mécanique du jazz, qu’elle trouve les intentions. Elle était super tendue, elle voulait trop bien faire. Depuis, elle a lâché quelque chose, elle a laissé apparaître la fragilité. Aujourd’hui elle est devenue la danseuse principale de la compagnie, et on est devenus un couple de danseurs, comme ça n’arrive qu’une fois dans une vie. Une vraie osmose entre des danseurs, c’est une fois dans une vie.
On est proche du langage amoureux, là
Oui, c’est aussi fort que ça. Nos conjoints savent que quand on se retrouve tous ensemble, c’est Suzie et moi d’un côté, à parler tout le temps de ce qu’on pourrait faire. On a une passion de se voir, on est très attirés l’un par l’autre, tout le temps, on ne peut pas s’en empêcher. C’est très fort : c’est de l’émulation, de la créativité. On se surprend.
On a vu ce qu’Herwann a changé chez Suzie, mais qu’est-ce que Suzie a changé chez Herwann ?
Mon écriture. Je suis moins dans l’acrobatie, l’écriture est plus fine. Je ne fais plus de différence entre elle et moi. Suzie n’est plus dans l’apprentissage, elle sait comment être, elle propose des changements, des évolutions. On va tous les deux à la limite d’un épuisement identique. C’est du plaisir comme une drogue. Elle suit toujours et elle m’épuise. On a trouvé un équilibre homme/femme, une égalité.
Propos recueillis par Isabelle Nivet
Mai 2018