Le jardin. Un spectacle de l'atelier des possibles
On est allée à la rencontre, un joli matin plein de soleil et de rosée dans l’herbe, d’Elsa Amsallem, de L’atelier des possibles. C’était dans un jardin, un jardin incroyable, un parc de château sans château, le Domaine du Leslé, à Pont-Scorff, normal à Pont-Scorff, parce que c’est le Théâtre du Strapontin qui accueillera à l’automne le spectacle nocturne Le jardin. On a fait le tour de ce jardin dans lequel il ne reste plus qu’une maison à l’apparence d’une maison de gardien et une autre qui est une chapelle et de hauts murs pour garder un château disparu. Une grande grille et une grande allée et des arbres, beaucoup.
Elsa Amsallem, elle dit :
« Pour écrire, le point de départ, c’est un lieu pour inventer une histoire, ici les jardins qui font monde. La nuit bascule, tu es pris dans le lieu, la peur, le lointain, le présent ». On suivra des guides, on jouera le rôle de spectateurs, on rencontrera une femme énigmatique, on marchera le long de bougies dans de petits pots en faisant bien attention de ne pas les renverser, on ne saura plus trop qu’est-ce qui est faux et qu’est-ce qui est vrai, le cri des oiseaux de nuit, les créatures qu’on croit cachées derrière les arbres, les légendes, les bêtes sauvages dans le froid de la nuit, à la lumière de lampes torches et de bougies : « Le public se retrouve à réagir à ce qui se passe à l’instant présent, et les comédiens aussi – comme des guides, qui montrent à voir »
Mais alors, c’est quoi la différence avec les spectacles de Lumière d’août ? Pour Elsa Amsallem, qui connait bien cette compagnie amie (dont on vous parle souvent, rappelez-vous Blockhaus, à la base de Lorient)
« Chez Lumière d’août, le paysage est plus un décor, avec une profondeur de champ, et des spectacles exploitant la frontalité, le 4e mur. Nous, on embarque le public dans un déplacement, un parcours, une marche, une déambulation. On arpente. On explore. Et en commun avec eux, il y a le fait de travailler sur les lointains »
Les sources d'inspiration
Le film
Stalker, de Tarkovski
Les livres
Une brève histoire du jardin, de Gilles Clément
Le gang de la clef à molette, d’Edward Abbey
Zone à étendre, de Mariette Navaro
L’arbre-monde, de Richard Powers
C’est Ronan Mancec qui a écrit le texte Le Jardin. Comme on aime beaucoup beaucoup Ronan Mancec et sa manière d’écrire, et qu’on a fait un stage d’écriture avec lui et qu’on avait beaucoup beaucoup aimé, on vous glisse un extrait d’un de ces textes qui s’appelle Je viens je suis venu :
Je suis venu parce que tu l’as voulu
Et je ne suis pas venu parce que moi je l’ai voulu
Voilà ce que je voulais te dire
Je suis venu, parce que tu me l’as demandé
Tu ne me l’as pas demandé comme ça
Mais –
Tu as passé ces seize derniers mois à me le demander
À ta manière qui est la manière insidieuse
L’air de rien
La manière qui se moque du monde et de moi pour commencer
Ne te moque pas de moi
Tu passes ton temps au téléphone à me le demander
Tu me demandes de venir
Et moi je viens
Je suis venu
Me voilà
Et j’espère que tu es contente