Géraldine en transition. Les labels. 1ère partie
Par Géraldine Berry. 17 novembre 2022
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Une rubrique soutenue par la Biocoop 7 épis
Je me suis toujours demandé quelle était la logique de mettre un petit logo AB sur un emballage. Bah oui après tout, le bon sens voudrait que tout soit bio et que ce soit le reste qu’on indique. “Ce produit contient des conservateurs qui peuvent te filer un cancer du côlon”, “Ce caramel présent dans ton cola – et dans ton pastis – pose pas mal de questions de santé publique et est l’objet d’études régulières”, “Ton enfant est hyperactif à cause des colorants azoïques des bonbons (et pas parce qu’il est surdoué)”, “L’agriculteur qui a fait pousser ces prunes n’a pas hésité à vaporiser des pesticides, mais no stress, il portait une combinaison pour le faire. Bon appétit !”
Effectivement, je me dis que ne sont pas toujours indiquées les informations qui nous seraient vraiment utiles pour faire les bons choix en matière d’alimentation. Pourtant les emballages de nos produits sont souvent recouverts de logos divers et variés qui les font parfois ressembler à un combi Wolkswagen customisé d’autocollants touristiques. Il est difficile de s’y retrouver en faisant ses courses, et le marketing est fort, très très fort, si bien qu’une cocarde rouge avec un coq bien de chez nous apposée sur un fromage nous emmène au fin fond du Cantal, à l’époque où on buvait le lait directement au pis de la vache.
C’est une sensation à peu près aussi forte que dans une pub pour du jambon madeleine de Proust ou lorsque le camion du fromager arrive sur la place du marché, et qu’on accoure, pour croquer une bonne tartine de fromage à tartiner. Et la crème caramel cuisinée dans le gros chaudron de la laitière ? Un pouvoir si fort qu’on peut stopper assassinat ou exécution. Bref industriels et communicants font tout pour nous faire oublier ce qu’on avale. Et ils y arrivent. Parce que devant la surabondance de produits, le label est ce qui nous rassure et qui aide à faire notre choix. “Ah y a un petit rond jaune, c’est un bon produit ! Je prends !”
La jungle des labels
Les labels nous protègent. Du moins, ils sont là pour cela. Encore faut-il connaître leur signification.
Parlons AOC, AOP, IGP par exemple.
Une AOP – Appellation d’origine protégée – est un label européen certifiant des produits dont le savoir-faire de fabrication est reconnu et lié à une aire géographique. Toutes les étapes de fabrication du produit ont lieu dans cette aire géographique. L’ail rose de Lautrec, le haricot de Castelnaudary, le pruneau d’Agen, le crottin de Chavignol… sont des produits AOP.
L’AOC – Appellation d’origine contrôlée – c’est un peu la même chose, mais au sein du seul territoire français (l’AOP étant européenne), souvent d’ailleurs une première étape avant de devenir AOP.
Et l’IGP alors ? C’est là que ça se complique. Parce que l’IGP – Indication géographique protégée – sur le papier, c’est un peu comme l’AOP, sauf que le label est plus laxiste, garantissant qu’au moins une étape de la production est réalisée dans une zone géographique donnée, et le suivi d’un cahier des charges inhérent à chaque produit. L’IGP jambon de Bayonne, créée en 1998, a par exemple permis de resserrer la zone géographique de la provenance du cochon à 22 départements français uniquement (précédemment, le cochon était très voyageur). Donc oui le cochon du jambon de Bayonne vient peut-être des Deux-Sèvres, mais cela ne l’empêche pas d’être salé avec du gros sel provenant exclusivement des salines de Salies-de-Béarn, pas loin de Bayonne du coup. Par contre, ça ne l’empêche pas non plus de contenir les fameux nitrites cancérigènes. C’est pas chouette ?
Et si on veut se perdre encore plus dans la jungle des labels de terroir, il y a aussi les simples appellations, non protégées pour le coup, et non contrôlées non plus. La fameuse moutarde de Dijon par exemple correspond uniquement à une méthode de fabrication et à un type de moutarde, et non pas à un produit local. D’où la pénurie liée à la guerre en Ukraine, puisque les graines viennent pour la plupart du Canada. Et c’est ainsi que le savon de Marseille est majoritairement fabriqué en Chine ou en Turquie. Bon par contre, si vous voulez une moutarde bien française, achetez la moutarde IGP Moutarde de Bourgogne qui garantit une provenance des graines des 4 départements bourguignons.
Bref, comment on s’y retrouve ? Même moi qui écris cette chronique, j’en ai déjà oublié le début.
Faire confiance à quelqu’un en qui tu peux faire confiance
Toute perdue dans ces étiquettes, je me dis que le mieux est de faire confiance à quelqu’un dont c’est le métier. En faisant mes courses à un certain endroit, je sais que cet endroit va avoir décortiqué pour moi les labels et me garantir qu’ils n’ont rien de bidon. Exemple à mon sens de label bidon (déjà que je n’étais pas trop convaincue par le jambon de Bayonne…) : le Label Rouge. Celui-là, il est fier comme Artaban, alors que en vrai, il autorise les OGM, les produits chimiques de synthèse, la culture sous serres chauffées… Pas très restrictif quand même. Sauf que ouf, le Label Rouge n’est pas cumulable avec un label bio, et je vais vous dire, cela me rassure.
Après le bio, bon… t’as quelles garanties ? Parce que, je l’entends souvent : “Le bio, ça existe pas vraiment. Le local c’est bien aussi. Pas forcément la peine que ce soit bio hein, si c’est pour manger du bio de Chine. Et nos petits producteurs qui peuvent pas payer la certification ?”
Je décide d’investiguer un peu plus. Et c’est parti pour une enquête de terrain. Je tourne la tête à 45 degrés. “Chéri ? (oui c’est facile, chéri a été maraîcher bio pendant 10 ans).” “Hum…” “En vrai, pourquoi t’être embêté à payer la certification bio toutes ces années ? Y a des producteurs qui disent que ça leur coûte trop cher, mais qu’ils font de l’agriculture raisonnée, et que c’est pareil, sans le logo.” “Ben non c’est pas pareil. Ne pas avoir la certif’ c’est t’autoriser à mettre un petit coup de “jaja” quand ça marche pas comme tu veux. Raisonné, ça veut pas dire clean. Local non plus d’ailleurs.” “Oui mais ça coûte cher la certification bio ? Pour les petits producteurs ?” “Franchement, pour nous (GAEC de la Terre et des Hommes à Kervignac – un peu trop sexiste comme nom non ? – vendu et devenu en 2021 le GAEC des Simones – un peu trop féministe comme nom, non ?), ça nous coûtait à la fin 450 euros par an pour 2 hectares de plein champ et 2600 m2 de serres. 450 euros pour trois maraîchers pour offrir une vraie garantie aux consommateur·rice·s, ça vaut le coup. D’autant que tu t’y retrouves aussi dans les prix de vente.”
Voilà. Le bio, c’est la garantie. Et on est d’accord que le bio local c’est le top. Le bio local de saison même.
La semaine dernière lors d’un débat qui a suivi la projection d’un film dans le cadre du festival Alimenterre, une phrase m’a marquée : “Etre en bio, c’est le minimum”. Mais ça veut dire quoi ? On en parle la prochaine fois ?
A suivre…
Géraldine Berry. Novembre 2022
Imparfaite, incomplète mais engagée, j’essaye de participer au jour le jour à une société plus verte, persuadée qu’une goutte d’eau dans la mer, c’est déjà ça.
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